Marie-Anne Guillemain
Née à Paris en 1970, c’est en entrant dans un atelier lillois qu’elle a décidé de devenir céramiste. Après une formation en décoration et en tournage au Centre national de formation aux métiers de la céramique (Cnifop) de Saint-Amand-en-Puisaye, elle s’est installée au Meix de Chalaux, dans le nord du Morvan.
à travers les sculptures et les objets qui sortent de son atelier, Marie-Anne Guillemain cherche à restituer le meilleur du monde qui nous entoure, sa beauté, sa sensualité, son étrangeté, à nous montrer ce que nous négligeons. Sa production montre que l'art n'est pas obligatoirement conceptuel : il doit pouvoir se passer de longs commentaires ou explications, parce qu'il contient son propre langage. L'art n'est pas non plus issu uniquement du monde urbain, il n'est pas réservé aux centres d'art dit contemporain. Il peut trouver sa place chez tous, il peut être durable, il peut être populaire. Et si l'art peut exister juste pour le plaisir, la méditation ou le questionnement, il peut aussi être présent dans les objets usuels et quotidiens.
« Il y a des outils, bien sûr, dans le travail de la terre : le tour, qui permet de donner une première forme, et des choses pour couper, racler, affiner… mais le premier, c’est la main. Voilà sans doute pourquoi j’ai d’abord choisi cette matière.
Les argiles sont d’une diversité de textures, de couleurs incroyables. J’utilise les grès et les porcelaines. Ces terres doivent être cuites à haute température, pour que, vitrifiées, elles changent de nature, « sonnent », acquièrent tension dans les courbes et solidité. La porcelaine devient translucide et les émaux fusionnent littéralement avec l’argile qu’ils recouvrent.
Mes pièces sont le plus souvent réalisées à partir de terre tournée pour que ce matériau, au départ collant, lourd, s’élève et enveloppe la forme : la sculpture céramique est aussi faite de l’air qu’elle contient. C’est celui du Morvan que j’inspire, traversé par la lumière dorée sur les prés, qui transporte l’odeur des sous-bois et la brume des lacs.
Les formes tournées sont découpées, assemblées, gravées, peintes… Avec le grès et la porcelaine, c’est un défi, parce qu’après la cuisson, elles peuvent réduire d’un cinquième de leur volume, avec tous les risques de fendre, de casser que cela suppose.
Quand elles sortent intactes du four, les porcelaines captent la lumière, la transfigurent, et rendent tous les détails du travail au pinceau, des motifs gravés. Les émaux, que je confectionne à base de minéraux, d’oxydes métalliques et de cendres de bois, révèlent des couleurs, des matières souvent inattendues, parce que chaque argile et chaque essence a son propre langage.
Elles dialoguent dans mon atelier, je me mêle à la conversation. »